Il nous avait échappé, cet ouvrage paru en 2013 aux Presses universitaires de Limoges et signé par Jean-Marc Valentin. Il est consacré à René Viviani, Un orateur, du silence à l’oubli et est le premier, après un mémoire de l’IEP de Toulouse, à tenter de nous dire ce que fut la vie du député socialiste, ministre et à deux reprises président du Conseil.
Un livre bien déroutant, à vrai dire, par sa forme et par ce qu’il y manque. Présenté en une architecture thématique (ses origines ; ses rapports à l’Algérie ; l’homme privé ; l’avocat ; le militant ; le député ; etc.), il ne permet pas d’avoir une vue d’ensemble et suivie de l’itinéraire de Viviani, empêchant toute lecture « documentaire » et ce d’autant plus que manque l’index qui aurait, peut-être, permis de s’y retrouver. De plus, l’écriture en brèves notations articulant des citations – le plus souvent de sources secondaires quand elles ne sont pas tout simplement absentes – en rend la lecture difficile. Mais le plus étonnant est que si la question importante de l’antisémitisme de Viviani y est abordée, vaguement, rien n’y est dit ou presque de l’Affaire et de l’engagement dreyfusard qui fut finalement le sien. Une page y est en tout et pour tout consacrée qui nous dit juste qu’il demeura « prudent » et que si Jaurès « soutint Dreyfus dès le début », Viviani ne le fit que « beaucoup plus tard » (p. 118). Jean-Marc Valentin aurait pu, aurait dû, pourtant, parler des discussions qui déboucheront sur la rédaction du manifeste des députés socialistes de janvier 1898, parler de son action au sein du Comité de vigilance, de son opposition à la loi de dessaisissement, de ses différentes interventions à la Chambre relatives à l’Affaire (7 décembre 1897, 24 février 1898, 26 juin et 14 novembre 1899), de sa demande de former une commission « chargée d’examiner s’il y a lieu de mettre en accusation, pour crimes commis dans l’exercice de ses fonctions, M. le général Mercier, ancien ministre de la Guerre » (Journal officiel. Débats parlementaires, 6 juin 1899, p. 1577), du projet qui fut celui de quelques-uns de faire de lui le premier ministre socialiste d’un gouvernement bourgeois, de sa défense de la cassation sans renvoi, de ses signatures à quelques listes de protestation (Picquart, Adresse à Dreyfus), etc. Une biographie qui demeure à faire pour connaître un peu mieux cet étonnant personnage et ce dreyfusard actif et toujours méconnu.
En attendant sa notice du Dictionnaire à paraître, on pourra toujours en savoir plus en se reportant au long article de Zévaès que nous avons donné il y a quelques mois et qui restitue une partie de ce que fut l’engagement de Viviani (voir ici).
Jean-Marc Valentin, René Viviani 1863-1925. Un orateur, du silence à l’oubli, Limoges, Pulim, 2013, 25 €.