Georges Valence, Raymond Poincaré

Georges Valence a publié, l’année dernière, chez Perrin, une biographie de Raymond Poincaré. Une nouvelle biographie après celles – la liste risque de ne pas être exhaustive – d’Henri Girard (1913), Henri Biget (1913), Gabriel Maisme (1914), Henri Seeholzer (1922), Maurice Reclus (1928), René Dumesnil (1931 ou 1932), George Samné (1933), Gabriel Hanotaux (1934), Fernand Payen (1936), Jacques Chastenet (1948), Pierre Miquel (1961), Daniel Amson (1997), John F. V. Keiger (1997), François Roth (2000) et Paul Marcus (2006).

Une biographie qui, si elle est plaisante à lire par la vivacité du style de l’auteur et la liberté de son ton, par sa plaisante ironie, n’apporte que peu de neuf. Si on passera sur quelques erreurs – en se contentant toutefois de signaler cette photo pleine page de Poincaré en avocat… qui est en fait Albert Clemenceau –, on regrettera qu’elle se contente de reprendre les travaux précédents (et tout particulièrement le Roth) en se passant tout à fait des sources archivistiques dont la consultation eût permis de faire de ce livre plaisant un livre qu’il eût été possible de ranger auprès des deux références que demeurent le Payen et le Roth et après lesquelles il demeure pourtant à dire. Concernant l’Affaire – le point n’ayant jamais été traité à fond, l’occasion est belle de le faire ici –, on ne peut parler, comme le fait l’auteur, de « relative indifférence » avant le célèbre discours du 28 novembre puis de passage du « bon côté » (p. 198) à partir de ce moment. En 1894, quand Dreyfus fut arrêté et condamné, Poincaré, ministre, comme ses collègues, ignora tout, on le sait, des petites manœuvres pour fabriquer un coupable et des arrangements avec le droit dont s’était rendu coupable le ministre de la Guerre, le général Mercier. Payen soutient, assurément avec raison, qu’il les apprit plus tard et sans doute bien avant que Bernard Lazare ne les révélât dans sa première brochure, brochure que, comme tous les députés, Poincaré reçut. Il semble peu probable, à en lire sa déposition devant la Cour de cassation (20 décembre 1898), que ce fût de la bouche de Mercier, comme le soutient Payen (214-215) mais plus sûrement – et la même déposition devant la Cour peut en porter l’indication – par le « patron » Jules Develle qui, depuis 1895, la connaissait comme il connaissait l’existence de la pièce « Ce canaille de D… » ; comment, en effet, imaginer que Develle qui avait mis les Dreyfus dans la confidence n’en eût pas parlé à Poincaré au cours d’une de leurs fréquentes conversations ? Il est ainsi possible, parce qu’il était avocat et parce qu’on le serait à moins, qu‘ainsi éclairé, Poincaré, comme l’écrit encore Payen, fut « indigné et violemment ému » comme il semble certain qu’il « dit et […] répéta partout… » ce qui était alors son sentiment. Une lettre de Lavisse à Poincaré, non conservée et révélée par Girard (p. 226), évoque les « inutiles efforts auprès de plusieurs ministres pour obtenir que l’affaire fût engagée dès le début, en des voies régulières » et donc, sans doute, comme le dit encore Payen, en prônant auprès de ses interlocuteurs aux affaires l’introduction « devant la Cour de Cassation une procédure de révision » (p. 215). Mais si tout cela semble probable, on ne peut plus suivre Payen – qui se montre vraiment un ami très fidèle et peut-être un peu emballé – quand il présente à ce moment Poincaré en « dreyfusiste ». Et la question n’est pas que de vocabulaire… Comme Poincaré l’expliquait en décembre 1897 à son ami Paléologue, son ancien condisciple à Louis-Le-Grand, l’affaire Dreyfus était « une affaire éminemment judiciaire » et il fallait « la laisser au prétoire et ne pas la traîner, comme on fait, sur la place publique »[1]Et à ceux, justement, qui voulaient le présenter comme dreyfusiste, comme approuvant la campagne du « syndicat juif », il répondait, comme il l’avait fait par une lettre en date du 10 décembre 1897 au Républicain de l’Est : « en ma qualité d’ancien membre du cabinet sous lequel a été poursuivi et condamné le capitaine Dreyfus, je suis, plus que personne, tenu au respect de la chose jugée[2] ». Mais dire cela n’est pas non plus rejoindre la narration de Georges Valence. En effet Poincaré, s’il se tut finalement, eut bien, on ne l’a jamais dit, l’intention d’agir et cela dès janvier 1898, au lendemain de la publication du « J’Accuse… ! », et plus précisément au moment où Cavaignac devait interpeller le gouvernement au sujet des pseudo-aveux de Dreyfus qu’il savait n’avoir jamais existé. Il s’était alors décidé à parler et sans doute l’eût-il fait si son ami Lavertujon, député de la Haute-Vienne, ne l’avait pas rappelé à la raison. Lavertujon, le 22, écrivait ainsi à Poincaré une lettre en partie connue mais jusqu’ici jamais mise en perspective[3] :

                                                                                                22 janvier 1898 Mon cher ami Je t’en prie, ne viens pas à la Chambre. Je crains que tu n’y commettes une irréparable faute. Tes amis du Palais te poussent à intervenir, tu ne sauras pas leur résister et ton intervention, quelle qu’elle soit, sera fâcheuse pour le cabinet et désobligeante pour tes anciens collègues [de 1894] Barthou, Hanotaux, etc. Quoique tu dises, on te cataloguera parmi les amis de Dreyfus et l’effet sera déplorable. Je ne te vois pas à Limoges dimanche prochain si aujourd’hui tu contribues à ébranler le ministère. Songe combien sera difficile notre situation à tous deux au milieu d’amis très ministériels et très antisémites. Je t’en supplie, si tu m’aimes un peu, renonce à cette manifestation, qui peut attendre assurément. Ne viens pas à la Chambre. Nos amis ont pris la résolution de soutenir de toutes leurs forces le ministère, nous sommes pleins d’entrain, nous comptons sur une belle victoire. Au milieu de la bataille, tu montes à la tribune. Grouchy ! C’était Blücher ! Ne fais pas ça, tu te perdrais à jamais. Tu n’as pas le droit de frapper ainsi tes amis. J’ai, autant que toi, souci de ta gloire. Tais-toi, reste chez toi, je te le demande en grâce. – Deschanel, lui, n’hésite pas ; sollicité de tous côtés – car on fait agir auprès de lui de nombreuses influences mondaines – Deschanel ne voit qu’un devoir : soutenir le ministère quoi qu’il dise. Je te fais porter ce mot par un ami. Puisses-tu ne pas être sorti encore, et m’écouter. Bien à toi Henri Lavertujon[4]

Poincaré n’ira pas à la Chambre et Lavertujon pourra, comme prévu, accueillir son ami à Limoges le 30 janvier. Dans le discours qu’il y prononça, Poincaré se montra bon ami, donnant ce qu’il voulait à son hôte et, pour obéir à la discipline de « parti » tout en préservant sinon sa gloire du moins sa carrière, tenant la ligne du ministère qui refusait – assez habilement – d’ouvrir le débat et s’enfermait dans le : « il n’y a pas d’affaire Dreyfus » de Méline. L’Affaire ? Pas même « une crise de nerfs »… tout juste des « agitations superficielles » ! Et si, dans ses notes personnelles aujourd’hui perdues, Poincaré put écrire, ainsi que le rapporte Payen, que « pendant plusieurs mois, [il] vécu[t] dans les transes les plus douloureuses » (p. 216), resta-t-il « sous sa tente », comme le notait Krantz[5] ou tenta-t-il, comme le dit Payen, d’engager le président du Conseil Méline, les ministres qu’il vit un à un, le président de la République Félix Faure (p. 216) ? Nous ne le savons pas mais ce que nous savons c’est que ce n’est pas en dreyfusard qu’il se présenta aux législatives de mai 1898, déclarant, opportuniste, dans sa profession de foi : « [La France] a une armée qui fait corps avec elle-même et dans laquelle servent tous les enfants du pays. Elle aime et elle respecte cette armée, qu’elle entend tenir en dehors de toutes les passions politiques et au-dessus de toutes les attaques. Elle la réserve, avec une jalouse fierté, pour les grands devoirs de l’avenir[6] ». Si par la suite, suivant le mouvement, il vota le 7 juillet avec toute la Chambre l’affichage du discours de Cavaignac, l‘arrestation de Picquart en juillet, la découverte du faux et la mort d’Henry le 31 août renforcèrent sa conviction. S’il avait pu dire en février 1898, le mot est célèbre, qu’il pouvait être « pour Zola sans être pour Dreyfus », il devenait maintenant pour Dreyfus. Krantz, dans les souvenirs qu’il écrira à chaud en 1899, se souviendra d’un Poincaré alors « extrêmement animé au sujet de l’affaire Dreyfus : devenu révisionniste passionné, il était particulièrement monté contre Méline et Billot dont il déclarait bien haut l’attitude absolument criminelle[7] ». Parlant maintenant « bien haut », mais réservant ses propos aux conversations privées, il ne devait pas tarder à être sollicité par les dreyfusards. Ferdinand Buisson, Alexandre Millerand, Maurice Bernard, Félix Decori, René Grosdidier, Hector Depasse, Henry Michel, Charles Jonnart, Reinach le poussèrent à agir, à parler : « Vous me direz un jour ce qu’il vous faut d’injustice politique pour que vous débordiez » (Payen 221-222), lui avait écrit le dernier[8]. Mais Poincaré ne variera pas de la ligne qu’il s’était fixée et ainsi, le 25 novembre, alors que Picquart attendait la tenue du conseil de guerre appelé à le juger pour faux et usage de faux, sollicité par l’un d’entre eux, répondit pour se dégager : 

[…] je ne puis reprocher, sans motifs, l’impartialité et la loyauté des militaires qui auront à juger Picquart. Je ne connais pas celui-ci ; j’imagine les charges produites contre lui ; je ne puis donc me prononcer sur le fond des choses. J’ai été terriblement impressionné par les conditions dans lesquelles avaient été engagées les poursuites et par les lenteurs de l’instruction. J’ai, sans bruit inutile, mais avec fermeté, dit à M. Dupuy et M. de Freycinet que le gouvernement me semblait avoir le devoir de faire le possible pour que l’information se terminât et pour que, s’il y avait inculpation, les débats fussent publiés. J’ai fait ces démarches très spontanément, avec beaucoup de mes amis, dans l’intérêt de la paix publique et de la vérité. Mais je ne connais aucun moyen légal d’intervenir dans une instruction judiciaire qu’elle soit militaire ou civile. J’attends donc les débats […][9]

Trois jours plus tard, le 28, Poincaré prenait pourtant la parole à la Chambre. Il s’y était rendu ce jour-là avec la ferme intention de parler… et de parler de Picquart et de la possibilité qui était celle du gouvernement de saisir la Cour de cassation pour obtenir le sursis de son procès. Charles-Dupuy doutait de la faisabilité de la chose ; « On vous le démontrera ! », l’avait assuré Poincaré avant la séance[10]. Et ce jour, Poincaré « déborda » et, réagissant à une sortie de Massabuau sur le Syndicat (« En voilà assez en vérité ! Je demande la parole »), fit finalement le discours que sans doute il avait voulu opposer à Cavaignac en janvier précédent et qu’il n’avait pas fait à la demande de ses amis. Un discours qui demandait certes qu’il fût « sursis à des procédures annexes et connexes » mais qui le faisait de manière accessoire. Poincaré, avant tout, y remettait en place ce qui s’était passé en 1894 et expliquait son silence jusqu’à ce jour et les raisons qui l’avaient dicté. Comme il le précisera au journal Les Droits de l’Homme (30 novembre), en une parfaite synthèse : « Si j’avais été appelé à déposer devant la cour d’assises lors du procès Zola, je me serais retranché derrière le secret professionnel, ainsi que l’ont fait certains de mes anciens collègues, avec raison. Je l’aurais fait parce que la cour d’assises n’était pas la juridiction compétente appelée à réviser le procès Dreyfus. Aujourd’hui que la Cour de cassation est saisie, je me considère comme délié et je dois à la justice tout ce que je sais, sans aucune restriction, sans aucune réserve. » Avec ce discours, il apportait certes un important soutien aux dreyfusards mais se gardait bien de se positionner comme tel :

J’ai, depuis deux ans, comme vous tous, j’en suis convaincu, l’unique désir, l’unique préoccupation de connaître enfin la vérité, la vérité tout entière et quelle qu’elle soit, dans les douloureux incidents qui ont angoissé le pays. Je suis de ceux qui ont déploré et blâmé les violences d’une campagne où les chefs de notre armée étaient trop souvent confondus avec des personnalités imprudentes ou coupables. (Très bien ! très bien !) Je suis de ceux qui ont estimé, avec l’immense majorité d’entre vous encore, que l’autorité d’une décision judiciaire ne devait pas être ébranlée par des moyens détournés, illégaux et presque révolutionnaires, comme on a essayé de le faire au début de cette affaire. Mais je suis aussi de ceux qui, dès le début également, ont demandé au Gouvernement, en des observations pressantes que plusieurs des anciens ministres n’ont certainement pas oubliées, de mettre un terme rapide aux abus intolérables qui se commettaient dans certains bureaux du ministère de la guerre et qui, après s’être longtemps laissé deviner ou entrevoir, ont fini, comme il était inévitable, par éclater au grand jour.

Le discours de Poincaré (1ère photo prise à la Chambre en séance). La Vie illustrée, 8 décembre 1898, p. 90.

Quelques jours après, Poincaré, attaqué par la presse nationaliste et par la presse de la Meuse dont Le Républicain de l’Est qui lui reprochait d’être atteint de « Sémitisme , « microbe qui ne pardonne pas » (4 décembre),  signait « Un vœu », dont Lavisse avait pris l’initiative, pour demander nettement ce sursis du procès Picquart qu’il n’avait fait qu’évoquer à la tribune : « Les soussignés, désirant que le conseil de guerre puisse s’éclairer complètement, expriment, dans l’intérêt commun de l’armée et de la justice, le vœu que le procès Picquart soit ajourné après la décision de la Cour de cassation, qui dispose des plus amples moyens d’information[11] »… une version « douce » de la protestation Picquart à l’attention de ceux, comme Poincaré, « qui, jusqu’à présent, sont restés le plus complètement sur la réserve[12] ». Dans la foulée, il signa aussi l’« Appel à l’Union » (2e liste, 25 janvier), appel qui, toujours à l’initiative de Lavisse, répondait à la demande qu’il avait formulée, sur le ton de la confidence, en août précédent, à Poincaré :

                                                              Le Nouvion-en-Thiérache (Aisne) 1er août 1898 Cher Monsieur, Pensez-vous que le moment est venu ou qu’il viendra de mettre entre les furieux un tiers-parti ? Plusieurs fois un tiers-parti modéré, raisonnable, de bon sens à la française a trouvé la solution de conflits qui semblaient insolubles. Le tiers-parti de la Ménippée a contribué à l’apaisement d’esprits violemment aigris. Aujourd’hui, la guerre civile est dans les cœurs : pensez-vous qu’il soit efficacement possible de mettre un baume ? Il faudra pourtant bien un jour tenter quelque chose. Trop de consciences souffrent en ce moment et crient ou bien ont envie de crier. Le programme est bien simple : amours sincère, respect sincère de l’armée, stupidement attaquée depuis la déplorable lettre de l’inconscient Zola ; mêmes sentiments pour la justice. Ne pensez-vous pas que si l’on parlait, on serait entendu aujourd’hui ou demain ? t. à v.               E. Lavisse Bien entendu, si vous me répondez, je vous promets le secret, sur l’honneur.[13]

Il faudra attendre début janvier 1899 pour que Poincaré répondît à la sollicitation de Lavisse. Préoccupé par le toute récente création de la Ligue de la Patrie française, il lui demandait de l’informer si jamais il était décidé de mettre en place une adresse « pour la pacification des esprits ». Préoccupé mais pas exactement inquiet, dans la mesure où les principaux ligueurs lui semblaient « décidés à accepter, quels qu’ils soient les résultats de l’information judiciaire » ouverte par la Cour de cassation depuis fin octobre et pour cela prédisait, « inévitablement », la séparation des « fractions hétérogènes de la Ligue »[14]. S’il devait y avoir une adresse, lui écrivait-il le 19, en employant un « nous » qui montre quel voulait être son engagement, il lui semblait clair qu’ils ne pourraient compter sur « des signatures parlementaires » : certains ne voulaient faire quoi que ce soit avant la fin de l’enquête de la Cour de cassation quand d’autres allaient « plus loin, et sont réfractaires à toute manifestation, même l’enquête terminée[15] ». Le lendemain, après avoir parlé à ses collègues et tenté de les mobiliser, Poincaré pouvait préciser ses informations :

Bourgeois, Ribot, Aynard sont opposés, en ce moment, à toute manifestation parlementaire. Bourgeois, notamment, dit qu’il faut, à son avis, attendre dans un silence absolu l’arrêt de la Cour de cassation. Barthou seul serait disposer à signer avec moi mais nos deux signatures isolées, surtout après nos récentes interventions[16], feraient, je crois, plus de mal que de bien. Si donc vous publiez l’appel, le mieux me paraît être d’exclure de la première liste tout nom politique. Peut-être viendraient-ils pour les suivants quelques recrues spontanées mais je n’y compte guère, et étant donné le crédit actuel des parlementaires, je n’y vois gère d’avantages.[17]

Le lendemain, 21, Lavisse écrivait à Poincaré pour l’informer qu’il était « tout à fait sur le point de lancer un Appel à l’union dont je crains au reste que la fortune ne soit pas brillante[18] » et le 24 Poincaré lui répondait : « Prenez mon nom[19] ». Comme il l’avait souhaité, son nom apparaissait en fin de deuxième liste, seul député, entre un industriel et un négociant : 

Les soussignés, déplorant les appels répétés à l’illégalité, à la violence et à la haine, persuadés qu’à l’heure présente le devoir de tous les Français est de travailler à la conciliation et à l’apaisement ; Également respectueux de la magistrature, gardienne de la justice, sans laquelle aucune société ne saurait subsister, et de l’armée, école de dévouement et de sacrifice, nécessaire à la nation pour la défense de son territoire et de ses droits ; Affirmant l’égalité de tous les Français devant la loi. S’accordent pour déclarer que l’agitation actuelle, funeste aux intérêts vitaux de la patrie, ne peut prendre fin que si tous les bons citoyens s’inclinent par avance devant la décision, quelle qu’elle soit, de la Cour de cassation, tribunal suprême du pays.

Cet appel à la mesure, à la pacification, ce refus – modéré et discret – de l’antisémitisme et des appels au meurtre et à la révolte, s’inscrivait dans le cadre particulier de la campagne, tout à fait scandaleuse et unique dans l’histoire, contre la Chambre criminelle de la Cour de cassation et à laquelle le gouvernement de la République avait répondu par un projet de loi proposant son dessaisissement au profit des Chambre réunies[20]. Contre cette loi inique, le 10 février, Poincaré et la plupart des grandes figures du parti républicain, du centre aux socialistes (Henri Blanc, Barthou, Decrais, Jonnart, Isambert, Léon Bourgeois, Brisson, Sarrien, De La Porte, Mesureur, Pelletan, Millerand et Viviani), publièrent une lettre ouverte :

Députés appartenant à toutes les fractions du parti républicain, nous croyons devoir, dans les graves conjectures que traverse le pays, affirmer notre commune résolution de maintenir au dessus de toute atteinte les principes supérieurs dont l’oubli entraînerait les éventualités les plus redoutables. Les lois de circonstance, imaginées en vue d’un cas particulier, ne sont jamais que l’expression irréfléchie des passions ou des intérêts d’un instant. Quelle nécessité d’enlever à la Chambre criminelle, qui vient de clore une information laborieuse, menée par elle depuis trois mois, le droit d’en consacrer par un arrêt les résultats, quels qu’ils soient ? Et pourquoi transférer ce droit à la Cour de cassation tout entière ? Y aurait-il, dans la Chambre criminelle, des magistrats indignes ? La loi a prévu le cas. Le ministre n’est pas désarmé. Qu’il défère les coupables, s’il en est, aux seuls juges compétents : au conseil supérieur de la magistrature. S’il ne le fait pas, c’est – il l’a plusieurs fois déclaré – qu’il n’y a pas de coupables. Il a lui-même, du haut de la tribune, rendu hommage à l’honorabilité et à la sincérité de ces magistrats. L’enquête disciplinaire, dont les pièces viennent d’être livrées à la publicité, a démontré l’inanité des accusations violentes dirigées contre eux ; et l’unanimité de la commission à laquelle la Chambre des députés a renvoyé le projet de loi, a tenu à indiquer dans le rapport que ces accusations n’étaient pas justifiées. Osera-t-on dire qu’il suffit pour disqualifier les membres de la chambre criminelle, que des calomnies et des outrages quotidiens les aient enveloppés dans nous ne savons quelle suspicion générale ? Si l’on entre dans cette voie, où s’arrêtera-t-on ? Si, dès qu’il est traité de suspect, un citoyen est considéré comme coupable, il n’y a plus ni lois ni paix publique. C’est le règne de la calomnie. On ne sera pas libre, du reste, de limiter ces concessions faites à une campagne d’intimidation, systématiquement entreprise, et qui procède étape par étape. Déjà la validité de l’enquête est contestée. Demain, les membres de la chambre civile et de la chambre des requêtes seront à leur tour pris à partie. La plus haute juridiction du pays aura été mise par les pouvoirs publics à la merci de la diffamation. Et l’on qualifie de loi d’apaisement une loi fatalement destinée à produire de telles conséquences ! Nous y voyons pour notre part une loi de discorde civile. Il ne s’agit pas, à nos yeux, de la solution à donner à une affaire sur laquelle, avant les débats publics, aucun de nous ne saurait avoir la prétention d’émettre une opinion motivée. À la justice seule il appartient de se prononcer. Tout le monde devra s’incliner devant son verdict, quel qu’il soit. Mais il faut qu’elle puisse rendre ce verdict dans la plénitude de son indépendance. Ce sont les garanties mêmes de la liberté et de la sécurité individuelles qui sont en jeu. Tous les citoyens, sans distinction de condition, – du plus faible au plus puissant, du plus pauvre au plus riche, – sont intéressés au maintien des règles élémentaires du droit. La France a besoin d’une justice respectée comme d’une armée forte. Criminels ceux qui voudraient opposer l’une à l’autre. Le gouvernement de la République n’a cessé de témoigner à l’armée nationale les témoignages de sa sollicitude. Il l’aime et il l’honore comme le gage et le symbole de nos plus chères espérances. L’armée, le sait. Étrangère aux querelles des partis, sourde à toutes les sollicitations, elle ne se laisse ni émouvoir, ni détourer de sa .patriotique mission. Ce serait lui faire injure que de la supposer capable d’entrer en révolte contre les institutions civiles les plus indispensables à la grandeur et à la dignité du pays. De ces institutions, la plus nécessaire à tout ordre politique est la justice. Sans justice régulière, il n’y a plus d’État social ; il n’y a plus de nation constituée ; il n’y a plus de civilisation. Faire une loi d’occasion pour enlever à une cour ou à tribunal un procès pendant, c’est introduire l’arbitraire dans le jugement des questions qui intéressent la liberté, l’honneur ou la vie des citoyens. C’est faire juger les juges par la politique. C’est créer un précédent funeste, dont les partis pourraient tôt ou tard se prévaloir pour assouvir leurs passions, ou satisfaire leurs rancunes. Des mesures de ce genre, alors même qu’elles seraient revêtues des apparences législatives, ne sont que des coups de force. Nous faisons un suprême appel au Gouvernement, qui représente la République et la France. Un projet qui suscite d’aussi vives alarmes que celles dont nous sommes les interprètes, ne rétablira pas l’apaisement et la concorde. Jamais pourtant l’union des républicains n’a été plus nécessaire. L’illusion n’est plus permise. Les ennemis de la liberté s’agitent et complotent. Réaction cléricale et démagogie césarienne se coalisent une fois de plus contre la République. Au risque de prolonger une crise si préjudiciable aux intérêts vitaux du pays, nos éternels adversaires préparent, comme en 1888, comme en 1877, un troisième assaut à nos institutions. Ne leur fournissons pas nous-mêmes des armes par des défaillances et des abdications sans excuse. Défendons, avec la République, les grandes idées auxquelles nous avons toujours été attachés. Maintenons fermement contre des attaques sacrilèges, les traditions mêmes de la Patrie.

La veille Labori, qui ne désarmait pas de pouvoir rallier son confrère Poincaré, qu’il connaissait bien, à la cause dreyfusarde, avait tenté de le rencontrer en se rendant à son domicile. L’apprenant, Poincaré avait écrit à l’avocat pour lui demander de s’abstenir dorénavant de pareille démarche. Il s’était élevé contre les irrégularités des procès Dreyfus et Esterhazy, défendait la Chambre criminelle face aux odieuses attaques dont elle était l’objet, mais n’en était pas pour autant devenu dreyfusard. « C’est de dessin délibéré, expliquait-il, que j’ai évité, en toute circonstance, de vous entretenir de l’affaire dont vous êtes chargé » :

Je ne la connais pas et ne crois pas avoir le désir de la connaître tant que la justice ne se sera pas prononcée. Vous avez comme avocat, une cause à défendre. Ce n’est pas mon rôle. Je puis avoir comme homme politique, à combattre pour des principes. Mais je tiens, non seulement à garder mon indépendance (qu’une conversation n’altérerait pas), mais à conserver de cette indépendance nécessaire les apparences elles-mêmes, dans l’intérêt supérieur des idées pour lesquelles je puis avoir à combattre. Excusez-moi donc et croyez à mes meilleurs sentiments.[21]

La lettre de Poincaré contre la loi de dessaisissement marquait sa rupture définitive avec Méline dont il avait été jusqu’alors un fidèle soutien et pour la tranquillité duquel il avait accepté de ne pas prendre la parole, l’année précédente, ainsi que le lui avait demandé Lavertujon. Il ne restait, en mai, qu’à la signifier. Nous connaissons cette lettre que révéla Payen (p. 427-429) et que résume Georges Valence (p. 201) mais dont il ne cite pas – et on ne peut le lui reprocher, la lettre valant plus pour ce qu’elle dit de deux conceptions opposées sur le fond de ce que devait être la politique du groupe progressiste – le passage tout à fait remarquable sur l’Affaire et le reproche fait à Méline à son sujet :

C’est sous votre Cabinet qu’ont été commis, au Ministère de la Guerre, les plus effroyables abus. C’est sous votre Cabinet qu’ont été fabriqués les faux, qu’ont été écrites les lettres de chantage au Président de la République, qu’il y a eu collusion entre certains officiers de l’État-Major et Esterhazy, que l’irresponsabilité et le désordre se sont établis à demeure rue Saint-Honoré. Vous ignoriez tout cela… Mais pourquoi l’ignoriez-vous ? Parce que vous vous refusiez à voir qu’il y avait, engagées dans l’affaire, à côté de la question juridique, les plus graves questions administratives et politiques. […] L’Affaire passera, dites-vous, et je l’espère bien, Grand Dieux ! Mais quand elle sera passée il y aura des conclusions générales à en tirer. Les sanctions individuelles sont à mes yeux de peu d’importance en regard des enseignements durables qui se dégagent de toutes les révélations auxquelles nous avons assisté… Faire comprendre à l’Armée qu’elle a intérêt à répudier les solidarités compromettantes, réorganiser le commandement, rétablir dans les bureaux de la Guerre le respect du Gouvernement, l’idée de la discipline, et jusqu’à la conception de l’honneur ; défendre en même temps cette armée contre les entreprises cléricales et contre les attaques des antimilitaristes. Et pour y arriver, reconstituer à égale distance des extrêmes un parti républicain dépouillé de toute compromission réactionnaire et abrité de toute influence collectiviste.

Mais l’Affaire, dont il voulait, pour le pays, voir la fin, était aussi devenue pour lui une réelle préoccupation. Il pourra ainsi dire à Krantz, le mois suivant, « qu’il avait consacré de longues heures à l’étude de l’enquête, qu’il en connaissait le dossier comme s’il avait eu à le plaider […][22] ». Toutefois, il tenait pas à s’en mêler et surtout, ayant été pressenti pour former le cabinet qui remplacerait celui de Dupuy, à se retrouver aux affaires dans le contexte du procès de Rennes. À Loubet, président de la République, il avait dit sa crainte des « complications de l’affaire Dreyfus » et de l’agitation dont le verdict de rennes, quel qu’il serait, marquerait le signal et l’avait donc invité à plutôt se tourner vers un cabinet radical ou vers une personnalité de la stature de Waldeck-Rousseau[23]. Cela dit – et assurément plus par sentiment de confraternité que par dreyfusisme –, il tiendra à écrire à l’épouse de Labori au lendemain de l’attentat dont l’avocat de Dreyfus avait été victime à Rennes :

J’apprends ici l’abominable attentat dont votre mari a été la courageuse victime. J’espère bien qu’à l’heure présente vous êtes déjà rassurée sur les suites de sa blessure. Après la longue maladie de Labori, voici pour lui et pour vous, Madame, une nouvelle et bien cruelle épreuve. Je vous prie de croire tous deux à ma vive et profonde sympathie.[24]

La condamnation de Rennes et la grâce qui préparait l’amnistie marquaient la fin de l’Affaire politique. La tentative de relance par la droite, en mai 1900, avait vu la Chambre, dans un bel ensemble, inviter « le Gouvernement à s’opposer énergiquement à la reprise de l’affaire Dreyfus, de quelque côté qu’elle vienne », un ordre de jour que Poincaré avait voté. Pourtant, quelques mois plus tard, il était attaqué par La Croix meusienne qui, dans son numéro en date du 28 octobre, le présentait en dreyfusard et en avocat des juifs. Deux jours plus tard, il répondait par une étonnante lettre de justification, de la plus plate démagogie, que La Croix meusienne se fit un devoir et un plaisir d’insérer dans son numéro en date du 4 novembre :

Paris, 30 octobre 1900. Monsieur le directeur, Je trouve aujourd’hui, en revenant du département de l’Isère, où j’accomplissais une période de service militaire, un numéro de la Croix dans lequel je suis de nouveau pris à partie. « La région de Commercv, dites-vous, a retiré sa confiance à M. Poincaré depuis le fameux dis cours dreyfusard et antipatriotique que ce député a prononcé au mois d’octobre 1898, depuis surtout le voyage de Bucharest en Roumanie. » Si la Croix avait publié le texte de mon discours du mois d’octobre [sic] 1898, au lieu de le commenter calomnieusement, vos lecteurs sauraient que je n’ai pas dit à la tribune un mot qui ne fût conforme à la vérité et que mon langage a été, tout simplement celui d’un honnête homme. Je suis du reste de ceux qui ont invité, par leurs votes, le gouvernement à s’opposer à toute reprise de l’affaire Dreyfus. Quant à non voyage de Roumanie, je ne vois pas par où il aurait pu me faire perdre la confiance de mes électeurs. Vous avez, il est vrai, autrefois prétendu que j’étais allé défendre à Bucharest un « entrepreneur judaïsant ». J’ai répondu en temps et lieu que j’avais été, à la demande d’amis communs, plaider pour un Français de famille chrétienne, chrétien lui-même, décoré de la Légion d’honneur, il y a plusieurs années, par le ministre de la guerre pour services rendus à la défense nationale. Bien entendu, vous n’avez pas rectifié. Vous dites enfin que ma clientèle juive augmente tous les jours. Les meilleures plaisanteries ont une fin. Celle-ci est évidemment excellente. Mais vous en abusez un peu. Je croirais avoir le droit, comme avocat, de défendre les juifs aussi bien que les catholiques, pourvu que leurs causes fussent justes. J’ai néanmoins écarté très volontairement toute clientèle Israélite. J’ai toujours refusé, avec un soin scrupuleux, les affaires que même des gens de parti pris auraient pu me reprocher d’avoir acceptées. Celles dont je me suis chargé, je les ai plaidées au grand jour, et je vous mets au défi d’en citer une seule qui justifie vos allégations tendancieuses. Je vous prie, monsieur le directeur, et au besoin je vous requiers, de publier intégralement cette lettre dans votre plus prochain numéro. Recevez mes salutations. R. Poincaré.

Pour les dreyfusards, cette lettre était une trahison. Maurice Charnay, dans La Petite République (8 novembre), présenta Poincaré en « jeune arriviste », qui reniait aujourd’hui son dreyfusisme comme « tant que le mensonge triompha[it], […] s[‘était] tut, et […] n’[avait] éprouv[é] le besoin de “dégager sa conscience”, que lorsque le parti des faussaires [lui avait] par[u] mortellement atteint » ; Ranc, dans La Dépêche, parla d’ « antisémitisme hypocrite, pleutre, honteux […] pour ceux qui le pratiquent » ; et Pressensé l’exécuta à proprement parler dans L’Aurore : « Je ne sais si cet aveu de lâcheté produira sur tout le monde le même effet répulsif que sur moi. Mieux vaut cent fois un antisémite : il en est parfois qui le sont par bêtise et pauvreté d’esprit, sincèrement. M. Poincaré, boycottant les Sémites, par peur, est un de ces tièdes dont l’Ecriture dit que Dieu les vomit » (6 novembre). Face à ces attaques que venaient doubler celles des nationalistes qui l’accusaient d’opportunisme, Poincaré, dans une interview au Courrier du Soir, tint à se justifier :

Depuis les déclarations que j’ai faites à la tribune à propos de l’affaire Dreyfus, j’ai été maintes fois accusés par les journaux antisémites et par la Croix d’avoir, comme avocat, une grande clientèle juive et d’avoir obéi, en parlant, à un intérêt personnel. Or, le fait est que je n’ai pas de clientèle dans le monde israélite. Je défendrais volontiers un juif pauvre. Mais j’ai toujours écarté de mon cabinet, d’une façon générale, toutes les affaires rétribuées qui auraient pu gêner, ou même paraître gêner, mon indépendance de député. Non seulement je ne suis pas antisémite, mais l’antisémitisme me semble une doctrine philosophiquement incompréhensible et socialement odieuse. Je crois donc que tout républicain, tout libéral, doit hautement répudier l’antisémitisme ; mais, pour le combattre avec quelque autorité, j’ai pensé que, par le temps qui court, il valait mieux enlever tout prétexte au soupçon. Je ne suis d’ailleurs, pas étonné de n’avoir, par là, satisfait ni les israélites, ni les antisémites.[25]

Mais il était trop tard. Criminel pour les nationalistes qui ne voulaient en démordre et le présentaient comme un dreyfusard, pire même comme celui qui avait été, ainsi que le répétera pendant toute la campagne de 1902 Le Patriote meusien« véritablement l’âme de la révision du procès Dreyfus » (« M. Poincaré et l’Affaire », 24 janvier 1902), il était devenu suspect pour les dreyfusards qui moquèrent pendant longtemps les libérations de « sa conscience »[26] et ses arrangements avec les ennemis de la République. Peut-être, comme l’écrivait Clemenceau, manquait-il de « caractère » lui qui n’avait pas su « trouver la bravoure de prendre parti alors qu’il y avait honneur à le faire. Un jour, la pensée lui vint de “libérer sa conscience” mais quand il vit le mensonge triompher légalement par la lâcheté des maîtres du pouvoir, il se jeta dans les bras du mensonge, jurant publiquement – ô misère ! – de ne jamais défendre un juif, eût-il cent mille fois pour lui, la loi, la justice, la raison[27] ».

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[1] Journal de l’affaire Dreyfus, Paris, Librairie Plon, 1955, p. 84.

[2] T., « Pour ou contre Dreyfus », Le Républicain de l’Est, 19 décembre 1897. Il avait transmis l’information à la presse qui avait diffusé l’information dès le 16 (Le Temps et L’Écho de Paris). C’est ainsi que L’Écho de Paris prit acte de sa déclaration : « C’est la première fois que l’un des collègues de M. Dupuy apporte le poids de sa parole dans le débat où tant d’intérêts essaient d’égarer l’opinion publique. Comme ministre des finances dans la cabinet et comme légiste éclairé, l’honorable M. Poincaré devait suivre avec un intérêt croissant les phases du procès engagé par le général Mercier. M. Poincaré a connu les péripéties de la trahison ; il a vu les preuves matérielles de la culpabilité du misérable qui vendait son pays. Aujourd’hui, le député de la Meuse donne sa conviction à ses compatriotes et il nous apure qu’elle est partagée par ses collègues, Jules Develle, le commandant Royer, un des héros de Bazeilles, et Prudhomme. Aux frontières, l’intensité des sentiments patriotiques permet moins qu’ailleurs au doute de s’infiltrer, dans les esprits. Nous ne sommes pas surpris que M. Poincaré ait voulu “protester hautement contre les calomnieux commentaires” des défenseurs de Dreyfus » (« L’affaire Dreyfus », 17 décembre 1897).

[3] Payen en cite quelques extraits de même que Roth qui la date par erreur, ce qui change tout, de l’année suivante.

[4] BNF n.a.fr. 16006, f. 174-175.

[5] « La crise », Papiers Krantz, AN 587 AP/4, f. 2.

[6] N° 1321. Chambre des députés. Septième législature. Session extraordinaire de 1899. Annexe au procès-verbal de la séance du 23 décembre 1899. Programmes et professions de foi et engagements électoraux de 1898, Paris, imprimerie de la Chambre des députés, Motteroz, 1899, p. 463.

[7] « La crise », Papiers Krantz, AN 587 AP/4, f. 2.

[8] Toutes ces lettres évoquées par Payen n’ont malheureusement pas été conservées dans les papiers de Poincaré à la BNF. Lavisse ne sera pas de ces correpondants, tout au moins à ce moment contrairement à ce qu’écrit Payen (p. 221) qui cite en effet cette lettre de Lavisse à Poincaré (reprise par Miquel, p. 166 et par Roth, p. 104 qui la date par erreur de 1898) dans laquelle l’historien s’y disait « extrêmement inquiet » et insistait auprès de son correspondant pour que « tous ceux qui ont quelque chose à dire parlent, et très nettement, ne fût-ce que pour libérer leur âme ». Lavisse ne pouvait ici faire référence à l’Affaire dans la mesure où lui tenait ces propos le 15 j[uille]t 1897. En fait, Lavisse y renouvelait simplement son invitation à procéder « à cet “examen pathologique de notre situation politique” » (BNF n.a.fr. 16006, f. 220).

[9] Sale 5607, lot 162, Christie’s, 9 novembre 2010

[10] Lettre de Charles Dupuy à Poincaré du 30 9bre 1898, BNF n.a.fr. 15999, f. 319-320.

[11] Le Temps, 6 décembre 1898.

[12] Lettre de Durkheim à Lavisse du 2 décembre 1898, BNF n.a.fr. 25170, f. 409.

[13] BNF n.a.fr. 16006, f. 224.

[14] Lettre du 7 janvier [1899] de Poincaré à Lavisse, BNF n.a.fr. 25168, f. 483.

[15] Lettre du 19 janvier 1899, BNF n.a.fr. 25168, f. 481.

[16] Qui, pour mémoire, avait à la suite de Poincaré, le 28 novembre, lui aussi « libéré sa conscience ».

[17] Lettre du 20 janvier 1899, BNF n.a.fr. 25168, f. 482.

[18] BNF n.a.fr. 16006, f. 225. Cette lettre est conservée dans les papiers Poincaré parmi les lettres de Lavisse. Lui était-elle adressée ou est-elle soit mal rangée soit à sa place dans les lettres de Lavisse mais adressée à un autre correspondant ? On peut se le demander à la lecture des lettres précédentes…

[19] Lettre du 24 janvier 1899, BNF n.a.fr. 25168, f. 480. [20] Voir Philippe Oriol, L’Histoire de l’affaire Dreyfus de 1894 à nos jours, Paris, Les Belles Lettres, 2014, p. ??????????.

[21] Lettre du [9 février 1899], Harvard University Library,  Ms Judaica 1.2, f. 19. Labori lui avait répondu le lendemain : « J’allais vous voir non en avocat, mais en citoyen, et pour obéir à un devoir de conscience. / Je comprends à merveille, surtout en lisant la déclaration parue ce matin, que vous ayez trouvé préférable de ne pas me recevoir. Je ne voulais que vous dire comment, à mon sentiment, le projet de loi Dupuy ne comportait de transaction d’aucune sorte. / Votre déclaration républicaine me fait du bien – Je tiens à vous dire comme citoyen : bravo et courage ! » (ibid., f. 10).

[22] « La crise », Papiers Krantz, AN 587 AP/4, f. 5.

[23] Abel Combarieu, Sept ans à l’Élysée avec le Président Émile Loubet, Paris, Librairie Hachette, 1932, p. 21.

[24] Lettre du 15 août [1899], BNF n.a.fr. 28046 (15).

[25] Non retrouvé dans Le Courrier du Soir mais repris par la presse dans les jours précédents le 15 décembre.

[26] Voir entre autre L’Aurore des 25 mai 1901, 20 mars 1902, etc.

[27] Clemenceau, « Le poincarisme », Le Bloc, n° 11, 15 mars 1902, p. 162.

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