Que « les historiens ne s’en offusquent pas », écrit Gilles Heuré dans son compte rendu du livre de Robert Harris, mais « il est bien naturel que l’affaire Dreyfus, tombée dans le domaine public de l’histoire et déjà évoquée en leur temps par Roger Martin du Gard, Proust ou Octave Mirbeau, puisse faire aujourd’hui l’objet d’un roman. » Nous ne nous en offusquons pas mais avons en effet quelque méfiance de principe et d’autant plus que le projet de ce nouveau D. dû à Robert Harris n’est pas d’utiliser l’Affaire comme toile de fond mais de faire de l’Affaire un roman, autrement dit de nous donner à lire LE roman de l’Affaire Dreyfus. Inévitable donc, comme pour les adaptations cinématographiques, que l’événement soit simplifié, que certains acteurs soient oubliés quand d’autres trouvent une importance qu’ils n’ont jamais eue et que la dimension psychologique qui supporte la trame narrative trace des portraits qui ne sont pas toujours conformes. Le roman obéit à des règles que l’histoire ne connaît pas… En une note liminaire, l’auteur nous prévient d’ailleurs des libertés qu’il a pu prendre avec l’histoire. Et sur cette base, il nous livre en effet un roman passionnant, facile et agréable à lire, bien mené et haletant. Et de plus, relativement au sujet qui est le sien et à travers les pièces qu’il cite régulièrement, un roman bien documenté. Mais cela importe-t-il puisqu’il s’agit d’un roman ? Nous sommes là dans toute l’ambivalence qui est celle de cet objet tout à fait particulier et peu identifié. Il est un roman et peut donc faire ce qu’il veut de l’histoire réelle qui en est à l’origine tout en étant la narration d’un fait historique, documenté, fondé en partie sur un travail archivistique, et reposant sur la trame, les épisodes et les caractères de l’événement qui en est son sujet et dont l’auteur nous garantit d’ailleurs, en son liminaire, la « réalité » et le caractère « véridique ». « L’affaire Dreyfus comme vous ne l’avez jamais lue », nous dit l’argument marketing de la couverture. Roman d’histoire plus que roman historique donc ? Et dans ce cas – et je ne peux m’empêcher de penser au lecteur peu familier qui lira ici moins un roman d’Harris (tout en le lisant parce qu’il est un roman d’Harris) qu’un roman sur l’Affaire – D. demeure tout à fait problématique.
Archives de catégorie : Bibliographie
La résistance juive à l’antisémitisme pendant l’affaire Dreyfus et les événements d’Algérie : de nouveaux documents sur le Comité de défense contre l’antisémitisme
Le remarquable et passionnant livre de Valérie Assan (Les Consistoires israélites d’Algérie au XIXe siècle. « L’Alliance de la civilisation et de la religion », Paris, Armand Colin, Recherches, 2012, 484 p.) vient compléter ce que nous savions sur la résistance juive à l’antisémitisme qui permet d’en finir avec la légende d’une passivité qui était jusqu’alors donnée comme un postulat.
Une bédé sur l’Affaire
Un très important inédit de Zola
Alain Pagès l’a annoncé au colloque de Tel Aviv (sur lequel nous reviendrons bientôt) : il vient de finir, pour paraître en octobre prochain chez Gallimard, l’édition critique des lettres de Zola à Alexandrine…
Mathieu Bidaux, Ernest Vaughan
Gilles Candar et Vincent Duclert, Jean Jaurès
Nous l’attendions, elle est arrivée. Même si nombreuses furent les tentatives biographiques de qualité (on pensera à l’essai de Jean-Pierre Rioux), la référence demeurait encore à cet égard le travail, ancien, d’Harvey Goldberg. Gilles Candar et Vincent Duclert nous livrent donc la toute dernière biographie du grand socialiste, une biographie assurément qui fera date. Pourtant, notre déception, il faut le dire, est grande. Si l’ensemble en est tout à fait remarquable, les deux chapitres consacrés à l’Affaire nous laissent quelque peu sur notre faim et tout particulièrement en ce qui concerne la première phase, celle de la prise de conscience et de l’engagement.
A propos de son Zola et le groupe de Médan, une interview d’Alain Pagès par Marc Knobel
Alain Pagès vient de publier Zola et le groupe de Médan aux éditions Perrin. A cette occasion, Marc Knobel l’interroge sur Zola, Médan et l’antisémitisme. A lire ici
A paraître… Les œuvres complètes de Bernard Lazare…
A la fin de l’année ou au début de la prochaine paraîtront, aux éditions du Sandre, les œuvres complètes de Bernard Lazare. Tous ses textes, tous, dont de très nombreux inédits et enrichis de nombreux extraits de sa correspondance. Ce volume, qui sortira en librairie en même temps que les œuvres complètes de Zo d’Axa, sera le premier d’une série qui proposera l’œuvre complète de quelques auteurs anarchisants de la période symboliste.
à suivreLe Procès-verbal du Congrès sioniste de Bâle de 1897
Workshop 19, maison d’édition sise à Tunis, vient de nous donner à lire le procès-verbal du premier congrès sioniste tenu à Bâle en août 1897. Cette « première édition française », comme le dit la couverture – le texte n’avait été en effet jusqu’alors publié qu’en allemand, en 1898 puis en 1911, et en hébreu en 1947 –, appelle quelques commentaires.
L’Affaire dans quelques récents numéros de revues universitaires I
Une petite récolte que nous ferons tous les 6 mois.